01 février 2009

La Bible de Lincoln et la Croisade de Lee Gordon

Chacun a pu voir que la cérémonie d'investiture d'un président des Etats-Unis est totalement encadrée par le clergé. Bénédicités, sermons et surtout la Bible sur laquelle le président élu prête serment.
Barack Obama a choisi la Bible de Lincoln.
Ce qui a terriblement ému l'ensemble des commentateurs : pensez donc, la Bible du grand homme, celui qui aboli l'esclavage !
Au lieu de prêter serment sur la Bible, on pourrait prêter serment sur la Constitution du pays, quoiqu'on en pense par ailleurs. On en comprendrait la logique : on prête serment sur ce qui fonde la société que l'on est amené à diriger. Ce qui signifie, tout compte fait, qu'avec la Bible, le sens profond est le même : la Bible représente les fondements de la société que le nouveau président va diriger et qu'il s'engage par conséquent à défendre.
Tout un programme, donc.
Et bien dans la Bible de Lincoln et d'Obama, comme dans toute autre Bible, on peut lire entre autres horreurs obscurantistes celles-ci, qui ont fondé la société esclavagiste :
Exode 21:1 : Yahweh à Moise : "Voici les lois que tu leur donneras.
2 Lorsque tu acquerras un esclave hébreu, son service durera six années, la septième année il s'en ira, libre, sans rien payer.
3 S'il est venu seul, il repartira seul ; s'il était marié, sa femme partira avec lui.
4 Mais si c'est son maître qui lui a donné une femme, et que celle-ci lui a donné des fils ou des filles, la femme et ses enfants resteront la propriété du maître, et lui s'en ira seul.
5 Mais si le serviteur déclare: "J'aime mon maître, ma femme et mes enfants, je ne veux pas être libéré",
6 son maître le conduira alors devant Dieu; puis l'ayant amené près du vantail ou montant de la porte, son maître lui percera l'oreille avec un poinçon et l'esclave sera pour toujours à son service."
7 Lorsqu'un homme aura vendu sa fille comme servante, elle ne devra pas s'en aller comme s'en vont les esclaves.
8 Si elle déplaît à son maître au point de ne pas la réserver pour lui, il la fera racheter."
Ex 21:20 : "Si quelqu'un frappe du bâton son esclave ou sa servante au point qu'ils succombent sous sa main, il subira la vengeance.
21 mais survivent-ils un jour ou deux, il ne devra pas être puni: car ils sont sa propriété." Le meurtre d'un esclave est moins grave que de travailler le jour du sabbat, de ne pas être vierge le soir de ses noces, de commettre l'adultère, d'avoir une relation homosexuelle...
Proverbes 29:19 : "On ne corrige pas un esclave avec des mots,
même s'il comprend, il n'obéit pas." On discipline esclaves, femmes et enfants comme les bêtes, avec le fouet. Si vous êtes dur de la comprenette, rendez-vous chez l'Ecclésiaste :
Eccl. 33:25 : "A l'âne le fourrage, le bâton, les fardeaux,
à l'esclave le pain, le châtiment, le travail.
26 Fais travailler ton esclave, tu trouveras le repos ; laisse-lui les mains libres, il cherchera la liberté.
27 Le joug et la bride font plier la nuque,
au mauvais serviteur la torture et la question."
On en remet une louche dans l'Epître à Tite 2:9 : "Que les esclaves soient soumis en tout à leurs maîtres, cherchant à leur donner satisfaction, évitant de les contredire,
10 ne commettant aucune indélicatesse, se montrant au contraire d'une parfaite fidélité : ainsi feront-ils honneur en tout à la doctrine de Dieu notre Sauveur."
Et on enfonce le clou dans la Première épître de saint Pierre 2:18 :
"Vous les domestiques, soyez soumis à vos maîtres avec une profonde crainte, non seulement à ceux qui sont bons et indulgents, mais aussi à ceux qui sont difficiles.
19 Car c'est une grâce que de supporter, par égard pour Dieu, des peines que l'on souffre injustement.
20 Quelle gloire en effet à supporter les coups, si vous avez commis une faute ? Mais si ayant bien agi, vous supportez la souffrance, c'est une grâce auprès de Dieu. "

Alors, on peut se dire qu'à défaut de jurer sur la Constitution et quitte à jurer sur un roman, autant jurer sur un bon roman. Une suggestion, certes tardive pour Obama - mais après tout il a juré une deuxième fois suite au cafouillage lors de la cérémonie - pourquoi ne pas jurer une troisième fois ? Par exemple, sur la Croisade de Lee Gordon du grand Chester Himes, dont c'est le centenaire cette année.
On peut avoir un rêve, non ?
Comme a dit un jour Martin Luther King...