03 juillet 2010

Chevalier de La Barre : un article du Midi Libre

Narbonne. Social
Aujourd'hui président national de la Libre Pensée, l'ancien secrétaire général de Force Ouvrière était à Gruissan, samedi 26 juin, pour honorer la mémoire du Chevalier de La Barre

ENTRETIEN
En quoi le destin de ce chevalier a une résonance, aujourd'hui encore ?
C'est le symbole d'une contestation laïque, victime de l'autorité de la royauté et de l'Eglise. Or, aujourd'hui, restons-nous dans un pays laïque quand un président - Sarkozy - veut faire entrer les religions dans la gestion de l'Etat ? Pour lui, l'histoire de France se réduit à la période entre la fille aînée de l'Eglise (Clovis) et 1789. Aujourd'hui, il parle de choc des civilisations !

Quelles peuvent en être les dérives ?
Je crains que Sarkozy n'utilise la religion pour régler les problèmes d'immigration. Il établit des relations avec le monde musulman, en reconnaissant officiellement ses structures. J'en veux pour preuve l'Etat qui délègue l'application de sa loi sur la Burqa à un organisme tiers.

La religion, selon vous, devrait rester dans la sphère privée...
Le fait est que cela n'a rien à voir avec la politique. C'est du registre du spirituel uniquement.

De même que vous dénoncez le financement des écoles privées par l'Etat, via la loi Debré. Aujourd'hui, pourtant, on ne peut pas dire que l'appartenance religieuse est un critère indispensable pour y être scolarisé
...Peut-être, mais on peut toujours essayer de récupérer ou convertir des croyants. Mais le problème n'est pas là. La religion prône la charité envers l'autre, la soumission... Moi je prône l'égalité entre les gens. Rien d'autre.

Quel est le rôle de la Libre pensée ?
On est libre penseur à partir du moment où on met des points d'interrogations à ce que l'on pense, que l'on a un esprit de contradiction permanent, que l'on s'oppose aux vérités révélées. Toute vérité conduit à une contre vérité. Après, quand on s'engage, on sait pourquoi.

A propos d'engagement, justement, comment analysez-vous la mobilisation des Français au sujet de la réforme des retraites ?
Nous n'avons pas réussi à les sensibiliser. Je suis pour que l'on dise aux travailleurs, oui, on augmente les cotisations pour avoir une retraite à partir de 2018. Il faut comprendre que c'est un salaire différé.

Le problème est que beaucoup de Français pensent justement qu'ils vont cotiser sans rien avoir, la retraite venue...
Mais les anciens auraient pu penser la même chose ! Ils ont osé croire le contraire. J'ai osé. Ce sont les liens que nous créons entre nous qui nous sauveront.

Et concernant le recul de l'âge légal du départ à la retraite ?
C'est de la m... Ou alors, on le met à 62 ans, avec interdiction de virer avant. Aujourd'hui, une majorité est au chômage à 55 ans.

Au delà, vous dites que le déficit provoqué par le système de retraite est artificiel...
Cette histoire est créée pour sauver Sarkozy, qu'il apparaisse comme un sauveur en 2012. Il a fait un travail de communication extraordinaire qui me laisse pantois. C'est un menteur et les Français le croient !

Comment, alors, est créé le déficit ?
En ce qui concerne les fonctionnaires, il s'agit en fait d'un budget de l'Etat. On est donc là dans un problème de déficit budgétaire.
Le système de répartition dans le privé, lui, est basé sur une solidarité entre générations à laquelle je tiens. Le régime général est excédentaire, seulement il sert à alimenter les exploitants agricoles, les militaires... Et les cultes. Il suffirait de les réaffecter pour retrouver l'équilibre. En réalité, l'Etat doit énormément d'argent au régime général. Le complémentaire, lui, relève d'une discussion avec le patronat.

Un mot sur le système de capitalisation...
Paradoxal, au moment où l'on voit où ça a mené l'économie mondiale... D'où le problème des syndicats. Comment expliquer aux salariés qu'ils ne s'en sortiront pas, financièrement, avec cette méthode ? Visiblement, nous n'avons pas suffisamment réussi...

De La Barre Le chevalier Jean-François de La Barre fut décapité, en 1766, après que le Parlement de Paris a statué sur le crime d'impiété pour lui et deux autres compères. Il n'aurait pas retiré son chapeau au passage d'une procession, et aurait vandalisé un crucifix.
A Gruissan, un buste en son honneur existe depuis 1931, face à l'église. Hier, une gerbe y a été déposée par les libres penseurs.

Propos recueillis par Marie PINTADO