24 mars 2007

Vendredi 6 avril Salle des Fêtes de LAUNAGUET

BANQUET DU VENDREDI DIT "SAINT" !
une contribution de Christian Eyschen et de Gérard Da Silva :

Il est une tradition dans la Libre Pensée, c’est de tenir des banquets gras le jour du vendredi dit « saint ».
Cette tradition manifeste une volonté de lutter contre tous les interdits religieux, dans le domaine alimentaire bien sûr, mais aussi dans tous les domaines de la vie quotidienne.
Ces banquets expriment la volonté de voir vivre une réelle liberté de conscience pour les citoyennes et les citoyens.

C’était hier…
Nina...
Le vendredi dit « saint », premier du genre, se déroula le 10 avril 1868.
Mais il y a toute une "genèse" de ces banquets.
A partir de 1867, la pianiste Nina de Villard (également connue sous le nom de Callias, celui d’un éphémère époux) est l'organisatrice de premiers banquets. Elle était célèbre pour ses concerts, salle Pleyel, où elle jouait Bach, Beethoven et Chopin.
Les banquets se déroulaient d’abord rue Chaptal, puis dans son hôtel particulier de la rue des Moines aux Batignolles. Elle y recevait Henri Rochefort, Villiers de l’Isle Adam, Anatole France, Paul Verlaine, Stéphane Mallarmé, Charles Cros... Organiser le débat politique contre l’Empire était une des raisons d’être de ces banquets. Certains de ses membres participèrent à la Commune : Rochefort, Cros... Quant à Nina de Villard, perçue comme trop favorable à la Commune, elle devait choisir l’exil en Suisse en 1871 pour revenir en France l’année suivante.
C'est de ces années que date son magnifique portrait peint par Manet, qui participait régulièrement à ses banquets.

le salon de l'athée occitan...
Le poète Louis-Xavier de Ricard tenait, avec sa mère, un salon chaque vendredi. On y trouvait Villiers de l'Isle-Adam, Verlaine, Anatole France... Ricard, grand poète occitan, est connu pour le procès que lui fit Mgr Dupanloup pour outrages aux bonnes mœurs : le poète était athée. Défendu par Gambetta, il passa trois mois à sainte Pélagie (avec 1200 francs d’amende). La voilà, la religion, dès qu’elle a le pouvoir et en outre celui de juger du «politiquement incorrect»!
Du moins le procès lui donna-t-il une notoriété suffisante pour ouvrir son salon du vendredi. Lorsque le décès de son père entraînera, pour raisons financières, la fin du salon, le même groupe se retrouvera, dès 1868, chez... Nina de Villard.
De Ricard fut membre de la Commune, collaborant au Journal officiel de la Commune. Parmi ses fidèles amis, en ces années, figurait Rigault, futur procureur de la Commune.
les tout premiers, les pionniers...
Toutefois, les banquets vraiment annonciateurs de celui de 1868 sont sans doute ceux organisés à partir de 1862 par Sulpice-Guillaume Chevalier, plus connu sous le nom de Gavarni, dessinateur et lithographe, collaborateur au Charivari.
Il a l’idée d’organiser chaque vendredi un banquet littéraire au restaurant Magny. Il reçoit l’immédiat soutien de Sainte-Beuve. Le premier banquet se déroule le 22 novembre 1862 avec les frères Goncourt, le docteur Veyne, médecin attitré de la Bohème...
Pas plus de treize !
Au début, il ne fallait pas être plus de treize. Rapidement le succès devait permettre de dépasser le chiffre fatidique, lequel veut bien dire une volonté de dérision délibérée de la Cène. Symbole qui nous rapproche du vendredi dit « saint ». D’autant que les Goncourt, dans leur Journal, devaient donner la description suivante du second banquet, chez Magny : « Comme j’entre, je vois Flaubert qui accapare Sainte-Beuve, et qui, avec de grands gestes, essaie de convaincre de l’excellence de son oeuvre ! ». Ainsi les deux protagonistes majeurs sont déjà présents aux banquets Gavarni. Parmi les convives, on trouve également Taine, Gautier, Renan...
Ce sont des «esprits fort », des rationalistes, pas des contestataires de l’ordre social. Ce qui se vérifiera lors de la Commune.
Gavarni meurt en 1866. Mais ses amis ne rejoignent pas les banquets organisés par Nina de Villard.
Ils vont avoir une autre idée...
On les retrouve, bien entendu chez Magny, rue Mazet. On retrouve les deux « esprits forts » : Sainte-Beuve et Flaubert. On retrouve Taine et Renan.
Et nous sommes le vendredi « saint », ce 10 avril 1868...
Le chiffre 13, qui signifiait une Cène parodique, symbolique inoffensive, s’est changé en une volonté d’opposition à l’ordre catholique, lequel, avec le procès fait au poète de Ricard, vient de montrer son perpétuel visage d’Inquisition.
Pour plus de protection les convives ont décidé d’inviter le prince Napoléon.
De sorte que, face à la fureur de l’Eglise et de l’ordre des «politiquement corrects» du temps, ils auront une protection. Ces gens là ne bravent que les faibles, jamais les puissants.
Ainsi Sainte-Beuve put répondre que ce jour avait été choisi car le prince Napoléon «... n’avait pas d’autres soirs de libres ». Le fait est que le frère de ce dernier, Napoléon III (celui que Bismarck disait être une «grande médiocrité méconnue », formule généralisable à beaucoup) convoqua le blasphémateur pour le réprimander.
Pie IX lui-même fut interpellé. Il y avait bien des «truites saumonées» et des écrevisses à ce menu. Le «faisan truffé» pouvait passer.
Mais le «filet de bœuf, sauce madère», c’en était trop :
«Mon royaume (de Dieu) pour un filet de bœuf, de qui blasphème-t-on ? » !
Certes, ce soir-là, ce ne fut pas la Révolution.
Mais quelques hommes et femmes tout à la fois d’esprit et de bon appétit avaient délégitimé l’ordre moral ainsi que son fanatisme liberticide, tartufe adorateur du saint blasphème.

Et c'est aujourd'hui...
Vendredi 6 avril
Salle des Fêtes de Launaguet


-inscriptions avant le 31 mars-


BANQUET DU VENDREDI DIT SAINT


Thème : l’humanisme athée
Menu à 15 €
Apéritif, entrée, paëlla, fromage et dessert, vin et café
Chèque à l’ordre de Libre Pensée 31 à retourner à l’adresse du siège