04 août 2008

L’Opus Dei fait son nid...

... dans une paroisse toulousaine :

«Les voies de la Providence sont impénétrables !» : sur le site de l’archevêché de Toulouse, l’abbé Franck Touzet, aumônier de l’Opus Dei rend grâce à Dieu d’avoir été nommé curé de la Dalbade, l’une des églises les plus importantes de Toulouse. Dans les faits, tout le mérite de la première nomination d’un membre du mouvement ultracatholique à la tête d’une paroisse française revient à Mgr Robert Le Gall, l’archevêque du diocèse.
«Il faut se méfier des préjugés», dit Olivier de Germay. Racontée par ce vicaire siégeant au conseil épiscopal, l’instance consultative diocésaine, la décision «n’a absolument rien d’exceptionnel en soi».

Franquiste.
L’histoire remonte à mai : «Cela s’est fait dans la plus grande clarté», explique ce responsable chargé des paroisses de banlieues pour qui l’Opus Dei, le mouvement fondé dans l’Espagne franquiste par José Maria Escriva de Balaguer, directeur de conscience du général Pinochet canonisé par Jean Paul II, est une «spiritualité parmi d’autres de l’église catholique».
Exit les «rumeurs infondées» qui feraient de «l’Œuvre de Dieu» en latin, une «secte» à la Da Vinci Code dont les membres, majoritairement laïcs recrutés essentiellement dans les milieux universitaires seraient chargés, outre la pratique de la mortification physique et de la surveillance mutuelle, d’infiltrer le pouvoir économique et politique.
«A Toulouse, la centaine de membres de l’Opus Dei sont connus depuis de nombreuses années pour leurs activités paroissiales notamment en direction des plus jeunes», ajoute Olivier de Germay.
«Au final, pour toutes les décisions, c’est toujours l’archevêque qui a le dernier mot», conclut-il. Depuis son arrivée à Toulouse en 2006, ce dernier ne cache pas son empathie pour l’Opus Dei.

Anonymat.
Le 20 juin 2006, à l’église de la Dalbade, Monseigneur Robert Le Gall, moine bénédictin spécialiste de la liturgie, ex-prieur de l’abbaye bretonne de Sainte-Anne de Kergonan, est l’un des deux archevêques français, avec celui d’Aix-en-Provence, à avoir célébré une messe en l’honneur de saint José Maria de Balaguer.
Un premier signe que personne à Toulouse n’avait jugé bon de relever. Hormis dans le cercle traditionnellement discret des membres de l’archevêché.
Sous couvert d’anonymat, la nomination d’un aumônier de l’Opus Dei délie cependant les langues. «L’archevêque est un carriériste qui veut ainsi se faire bien voir à l’approche de la venue du Pape Benoît XVI en France le 12 septembre», explique cet autre membre du conseil épiscopal.
«Cette visite officielle à l’invitation de Nicolas Sarkozy qui sera marquée par un pèlerinage du pape à Lourdes, est une première étape dans la préparation des Journées mondiales de la jeunesse catholique (JMJ) prévues à Madrid en 2011. L’Opus Dei sera le fer de lance de la préparation de cet événement d’où l’importance pour lui d’avoir des relais en France», ajoute-t-il.
Une affirmation démentie par Jean-Marie Dessaivre, le chargé de communication de l’archevêché de Toulouse : «L’aumônier de la Dalbade placé sous la responsabilité directe de Mgr Le Gall n’a pas vocation à s’occuper de la préparation des JMJ
Le seul à avoir osé officiellement réagir, «même s’il ne peut rien faire contre», est Pierre Cohen, le maire PS de Toulouse : «Nous nous serions bien passés de cette première. Je suis indigné par la nomination dans l’une des principales paroisses de la ville d’un membre de l’Opus Dei, une des organisations les plus dures de l’Eglise, connu pour ces rapprochements scandaleux dans le passé avec l’extrême droite espagnole.»
lundi 4 août 2008 - LIBERATION
Correspondance à Toulouse de J.-M. ESCARNOT


Un curé de l'Opus Dei entre à la paroisse de Dalbade
Polémique.

C'est une première en France. Le diocèse de Toulouse a fait appel à un aumonier de l'organisation ultra catho pour s'occuper de cette paroisse du centre-ville.
Valérie Sitnikow 02 Août 2008 - La Dépêche du Midi

Un prêtre de l'Opus Dei nommé curé d'une paroisse… Une première en France. À 66 ans, l'abbé Franck Touzet, un solide Normand, aumônier à Grenoble, arrive début septembre pour s'occuper de la paroisse de la Dalbade. Voilà qui ne restera pas dans le secret du confessionnal de cette importante église du centre ville qui compte quelque 5 000 fidèles, parmi les catholiques les plus pratiquants. Le diocèse de Toulouse ne fait pas mystère de cette nomination par l'archevêque Mgr Le Gall qui, depuis son installation à Toulouse en 2006, ne cache pas son empathie pour l'Opus Dei : cette branche controversée de l'Eglise fondée en 1928 en Espagne par le prêtre franquiste José Maria Escriva de Balaguer, souvent présentée comme la branche idéologique des cathos les plus ultras.
« Un coup de main »
« Ce ne sera pas une annexe, ni une église de l'Opus Dei », prévient Joseph Grifone, directeur du foyer Puymaurin qui abrite l'Opus Dei à Toulouse. « L'abbé Franck Touzet fera le travail de l'Église. L'Opus Dei est une prélature personnelle qui peut répondre à des besoins pastoraux précis. Mais ce n'est pas le travail de l'Opus Dei de s'occuper d'une paroisse. L'évêque nous a demandé de lui donner un coup de main, nous le faisons. Un membre de l'Opus Dei dépend de son évêque comme n'importe qui, mais il prend des engagements supplémentaires sur la formation et l'activité apostolique », explique Joseph Grifone, ancien professeur de mathématique universitaire, qui a débuté ses activités au sein de l'OD à Toulouse en 1973.
L'abbé Franck Touzet est l'un des trois seuls prêtres français numéraires de l'Opus Dei. L'organisation regroupe des fidèles selon un critère qui n'est pas territorial mais repose sur des personnes.
À Toulouse, l'Opus Dei local compte une petite centaine de fidèles surnuméraires (laïcs), dont une majorité d'intellectuels toulousains. Et une quinzaine de « numéraires » : des hommes et femmes vivant séparément dans les deux résidences Puymaurin. Ces derniers, qui ont fait vœu de célibat et de chasteté, pratiquent la mortification physique avec le port du cilice, véritable sanctification par la douleur, rapportée par le best-seller « Da Vinci Code » et le film qui a suivi. « La caricature était tellement forte », soupire Joseph Grifone, « finalement, les gens se sont informés et ont replacé les choses dans la réalité ».

Le maire de Toulouse « indigné »
Le maire de Toulouse, Pierre Cohen, se montre atterré par la nomination d'un prêtre de l'Opus Dei dans l'une des principales paroisses de la Ville rose. « Je suis à la fois surpris et choqué. L'Opus Dei est l'une des organisations les plus dures de l'Église avec, par le passé, des rapprochements scandaleux avec l'extrême-droite espagnole et le pouvoir franquiste. L'Opus Dei s'inscrit dans cette lignée. Je suis indigné. »