27 juin 2010

Crise de l'Eglise, crise des vocations et crise de foi

Record historique: seuls 83 prêtres ont été ordonnés cette année en France. Le clergé comptait 41.000 prêtres au début des années 1960. Ils ne sont plus aujourd'hui que 15.000, dont la moitié a plus de 75 ans. L'église catholique en France est proche du seuil de rupture.
Pour un prêtre ordonné chaque année, il en meurt huit.
A la cathédrale et sur le parvis de Notre-Dame de Paris, plus de dix mille catholiques ont assisté, samedi 26 juin, à l'ordination sacerdotale de neuf nouveaux prêtres par le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris. L'éclat et la joie de cette célébration n'ont toutefois pu dissimuler la profonde dépression des chiffres du clergé ordonné cette année en France. Record historique: seuls 83 prêtres, dans moins de la moitié des cent diocèses français, ont été ou vont être ordonnés en 2010 pour toute la France. Ils étaient 90 l'an dernier, 98 en 2008, 101 en 2007. Le chiffre annuel des ordinations s'était stabilisé au-dessus de cent dans la décennie 1990-2000. Le diocèse de Paris lui-même, pourtant préservé, n'aura plus que trois prêtres à ordonner en 2011.
Dans les années 1950, on ordonnait encore, chaque année, un millier de nouveaux prêtres. Les chiffres sont tombés à moins de 600 en 1960, à 285 en 1970, à 161 en 1975. Ils se sont stabilisés autour de 110 dans les années Jean-Paul II (1978-2005), avant de redescendre. L'entrée dans les séminaires a connu des décrochages identiques: en l'an 2000, la barre est passée pour la première fois en dessous du millier de séminaristes, contre plus de 5.000 au début des années 1960. Les séminaristes français ne sont plus que 700 aujourd'hui.
Les scénarios-catastrophes annoncés depuis des années sont en train de se réaliser. La France n'a jamais connu pareille pénurie de séminaristes et de prêtres. Pour un prêtre ordonné chaque année, il en meurt huit. Le clergé est un corps anémié, privé de sang neuf et régulier, tombé de 41.000 hommes, au début des années 1960, à 36.000 en 1975, à 20.400 en l'an 2000, à 15.000 aujourd'hui. Un clergé de plus en plus âgé et épuisé: la moitié des prêtres français a plus de 75 ans. Depuis des lustres, des diocèses ruraux n'ont plus ordonné un seul prêtre. Ils fonctionnent avec moins d'une cinquantaine de prêtres, certains, dans des régions très déchristianisées, moins d'une vingtaine.
L'inégalité entre diocèses urbains et ruraux ne fait que s'accentuer. En ville, il est encore possible de concentrer des moyens suffisants pour alimenter des réseaux actifs de chrétiens. On le voit dans les paroisses de centre ville à Paris ou à Lyon, mais dans les campagnes ou les petites villes, on est proche du seuil de rupture. Qu'il s'agisse des prêtres ou des pratiquants réguliers, les ressources humaines ne sont plus suffisantes pour redémarrer une vie paroissiale active. A Saint-Brieuc, terre catholique s'il en est, le diocèse comptait près de 1.000 prêtres en 1950. Ils ne sont plus que cent. Dans le diocèse de Strasbourg, en terre traditionnelle et concordataire, où le clergé est rémunéré par l'Etat, seuls deux cent prêtres sont encore en mission.

Henri Tincq, chargé des questions religieuses au quotidien Le Monde, brûle cierge sur cierge. "Comment en est-on arrivé là ?" s'alarme-t-il. "Comment expliquer que cette glissade n'ait jamais pu être stoppée depuis un demi-siècle ? Que les investissements engagés pour tenter d'étoffer un clergé étriqué n'aient pu sinon renverser, au moins corriger la courbe ? On peut toujours invoquer des causes extérieures comme le déclin du statut du prêtre. Ou la rupture, dans les chaînes de transmission, avec des valeurs éducatives qui privilégiaient le don de soi, la générosité et la fidélité. Ou la peur des jeunes face à des engagements de vie durables, voire définitifs, comme le sacerdoce (ou le mariage !). Ou la fin des familles nombreuses, pourvoyeuses de vocations : si 80% des séminaristes viennent encore de familles catholiques de trois-quatre enfants, le vivier des familles nombreuses et pratiquantes, parmi lesquelles les séminaires et noviciats d'antan recrutaient, se rétrécit. L'intimidation qui pèse sur les jeunes croyants dans une société très laïcisée, l'obligation absolue du célibat, sans doute aussi les affaires de pédophilie expliquent enfin cette pénurie de vocations religieuses." La cause première de la crise des vocations et donc de l'Eglise, pour M. Tincq, c'est donc une République très laïque qui intimide les jeunes croyants. La Gueuse, la voilà l'ennemie ! Pour faire bonne mesure, il concède du bout des lèvres que, bien sûr, les affaires de pédophilie et le célibat...
Le diagnostic du Dr Tincq est faux : il s'agit tout bonnement d'une crise de foi, sacrebleu !