02 janvier 2008

A propos du chanoine de Latran...


...une déclaration de Marc BLONDEL :


"Il n’appartient pas à la Fédération de la Libre Pensée qui est une organisation qui regroupe les partisans de «l’esprit libre», de faire de la politique, en ce sens qu’elle regroupe des personnes différentes quant à leur engagement personnel, mais qui ont en commun le refus de la soumission et des dogmes, tous les dogmes religieux bien entendu, mais aussi les sectes et toute organisation qui soumet l’individu.
Cette volonté de rébellion n’est pas le produit du XXIe siècle, elle fait partie de l’histoire de France et c’est son expression qui a conduit à la liberté, fait avancer les idées et construit notre démocratie. En un mot, s’est élevée contre le conservatisme, ce qui nous place comme les citoyens d’un pays démocratique qui, non seulement a édicté les droits de l’homme, mais a choisi la République comme forme d’Etat et adopté la devise : Liberté, Egalité, Fraternité. Ce qui sous entend que son Président doit en être le gardien vigilant en toute circonstance.
Or, notre Président, grand voyageur, semble parfois souffrir d’amnésie. Les plus tolérants d’entre nous s’étaient étonnés de la diligence avec laquelle il s’était rendu auprès de la curie romaine et du pape pour se faire introniser officiellement comme chanoine d’honneur de l’église St-Jean de Latran. Ses prédécesseurs, même ceux s’affirmant de confession catholique, avaient pris quelque temps, relativisant ainsi, au moins publiquement, l’intérêt
qu’ils portaient à cet honorariat.
Mais, le plus grave réside dans l’intervention que le Président a prononcée devant les cardinaux (pour lire le discours ou voir la vidéo de l'intervention du chanoine, clic ici !). Quel que soit le respect que l’on porte aux élus issus du suffrage universel et au premier d’entre eux, on ne peut que s’interroger sur la teneur générale de ce discours.
Agissait-il à titre personnel ou en tant que Président de la République Française ? La lecture attentive de la déclaration ne peut que provoquer l’ire de tout citoyen républicain.
Nous sommes habitués aux discours de circonstance et de complaisance, cette sorte de démagogie diplomatique qui consiste à dire à ceux qui l’écoutent ce qu’ils souhaitent entendre, mais à ce point c’est une première, à se demander si le Président ne voulait pas convaincre son auditoire qu’il pourrait accéder aux plus hautes autorités ecclésiastiques, un baccalauréat théologique en quelque sorte.
Mais de quel droit, ce faisant, associe-t-il la France à la foi chrétienne et limite-t-il notre histoire de Clovis au siècle des Lumières, regrettant en quelque sorte ce qui fit la liberté du pays et marqua le début de l’abandon de l’autorité religieuse et la soumission.
Est-ce là ce qu’il qualifie en métropole de «rupture», revenir aux racines qu’il prétend fort justement d’ailleurs, de chrétiennes, mais avec laquelle les hommes de progrès ont voulu rompre délibérément.
Comment ne pas sourire lorsque, pour accréditer ses affirmations, le Président cite, comme un palmarès sportif, le nom des Saints – et nous en avons beaucoup – voire des écrivains religieux. Au passage, nous lui conseillons la lecture du testament du curé Meslier qu’il aurait pu remettre au pape au lieu de Bernanos.
Et comment ne pas évoquer, par souci historique, le comportement équivoque de l’Eglise dans les périodes douloureuses de notre histoire.
Même la partie relative à la laïcité dénote un regret, sous forme d’amende honorable, pour ne pas dire de repentance, il souligne les souffrances des religions, prêtres et congrégations lors de la promulgation de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat.
Puis après avoir cependant constaté que la laïcité était une condition de la paix civile, il considère qu’il y aurait lieu de défendre une laïcité parvenue à maturité et d’en esquiver les contours.
La République Française refuserait de reconnaître le caractère cultuel de l’action caritative (comme si les association caritatives étaient toutes d’obédience catholique ou religieuse) et de donner les moyens de communication à l’Eglise (lorsque l’on sait l’artifice utilisé par la télévision KTO et la part que les médias, même publics, consacrent à la religiosité) et enfin le refus de reconnaître la valeur des diplômes dans les établissements d’enseignement supérieur catholique alors que la convention de Bologne le prévoit (ce qui est un aveu) et n’accorde
aucune valeur au diplôme de théologie ce qui, venant d’un chef d’Etat, prend valeur d’engagement.
Mais le point d’orgue reviendra à l’affirmation que la morale laïque risque de s’épuiser ou de se changer en fanatisme, pour conclure sur la notion de laïcité positive (qui serait un remake de laïcité plurielle) qui ferait que la laïcité ne considère pas que les religions sont un danger mais plutôt un atout !
CQFD.
Il terminera par l’affirmation commune cardinaux et lui «de la vocation».
A la lecture de cette importante déclaration, on comprend mieux les réponses négatives, au moins pour le moment, opposées par le gouvernement à la demande d’entretien de la Fédération de la Libre Pensée, pour connaître les suites au rapport Machelon sur loi de 1905.
On s’interrogera sur la forme du voyage du Pape en France ; puisque sa visite est maintenant souhaitée par le Président, la charge financière risque d’être affectée au Trésor Public.
Nous retiendrons que le Président ou le citoyen catholique SARKOZY est plus disert sur la religion que sur les droits de l’homme et qu’il s’interroge sur le fait spirituel qu’il considère comme la tendance naturelle de tous les hommes à rechercher une transcendance, ce qui est une opinion comme d’autres, donc discutable.
Mais, nous saurons ne pas confondre édifices religieux et Elysée, c’est notre forme de laïcité : aucune confusion entre le public et le privé.
La France républicaine de par sa constitution est réputée laïque, il serait souhaitable que son Président le soit,
c’est notre espérance."