25 octobre 2009

Entre laïcité et parité, il faut choisir

Une nouvelle loi, la loi Carle, vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale. Elle oblige explicitement une municipalité à payer pour la scolarité d’un élève résidant sur le territoire communal et qui serait scolarisé dans une école privée d’une autre ville.
Elle reprend, cinq ans après, l’article 89 de la loi du 13 août 2004 proposé par Michel Charasse (PS), qui avait soulevé un énorme tollé de la part de la majorité des élus locaux, en particulier des maires ruraux qui ne parviennent déjà que difficilement à financer leurs obligations pour l’école publique. Pour une ville comme Sevran, en Seine-Saint-Denis, en plus du financement des 193 élèves scolarisés à l’école catholique Sainte-Agnès de la ville, il faudrait financer la scolarité de plus de 400 enfants de la ville scolarisés dans des écoles privées d’autres communes.
Cette loi est adoptée pour « garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d’association ».
N’est-ce pas au nom de ce même principe dit « de parité » que des milliards de fonds publics sont déversés chaque année aux écoles privées (à 90 % confessionnelles) depuis la loi Debré de 1959 ? Au nom de cette « parité », la loi Guermeur (1977) a ensuite obligé les communes à financer la scolarité des enfants dont les parents ont fait le choix de l’école privée. Les accords Jack Lang-père Cloupet (1993) permettront, eux, le financement public de toute la formation des enseignants du privé.
L’enseignement catholique privé sous contrat est désormais intégralement financé par les fonds publics détournés de l’école laïque.
La « parité » n’est donc en réalité que la principale violation de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat, qui consacre l’obligation pour l’Etat de « ne salarier aucun culte ».
La loi Carle impose le versement d’un forfait communal qui devient obligatoire en cas : d’insuffisance des capacités d’accueil dans la commune de résidence ; d’absence de garderie ou de cantine ; de raisons médicales; de scolarisation dans une même ville que les frères et sœurs. Sur le terrain, avec les suppressions massives de postes dans le public, au moins un de ces cas est de plus en plus aisé à remplir.
Cette loi consacre, avec la prétendue parité, le financement par l’Etat de l’évasion des élèves vers les écoles privées confessionnelles.
On imagine donc l’indignation politique soulevée par le vote favorable à la loi Carle des sénateurs socialistes en 2008. Cette fois, à l’Assemblée nationale, tous les députés du PS, du PCF, du Parti de gauche, du MRG ont voté contre… Les députés socialistes ont même
déposé un recours au Conseil constitutionnel. Mais il s’agit d’un recours parce que la loi ne respecterait pas vraiment… « la parité ».
Faudrait-il donc s’opposer à cette loi parce qu’elle dérogerait au principe de « parité » ou parce qu’elle déroge au principe de laïcité ?
Faudrait-il donc, au nom d’une « juste parité », faire accepter les lois Debré, Guermeur et les accords Lang-Cloupet, que tous les gouvernements ont pérennisés au prix d’une des plus catastrophiques capitulations politiques des partis de gauche sous la Ve République aussi antidémocratique qu’antilaïque ? La loi Carle doit être abrogée, ainsi que les lois Debré, Guermeur et les accords Lang-Cloupet. Il n’y a pas de « parité » entre la laïcité de l’école et de l’Etat et sa violation.
La discussion sur la loi Carle met en évidence l’urgence de rassembler les militants laïques de toutes tendances sur l’exigence commune :
A école publique,
fonds publics, à écoles privées, fonds privés.

L’enjeu est la reconquête de la laïcité de la République et de son école publique.